par Véto-pharma Après l’introduction de cette nouvelle catégorie dans notre newsletter d’Octobre, nous avons été ravis de recevoir des retours très positifs concernant le premier article de cette série. Merci pour vos aimables commentaires, cela nous touche! Dans notre étude de cas de Novembre, Nous allons nous pencher sur un problème courant qui nous est présenté chaque année, sous des forms légèrement différentes.
“Mes colonies sont pleines de varroas ! J’ai mis des lanières à base d’amitraz dans mes ruches en Août, et je les ai laissées pendant huit semaines. J’ai retiré les lanières il y a un mois, et maintenant mes ruches sont à nouveau pleines de varroas. Comment est-ce possible ?
Je n’ai pas contrôlé les charges de varroas juste avant ni juste après le traitement, mais j’ai vu beaucoup de chutes naturelles pendant le traitement surtout au cours des premières semaines.”
Lorsque nous recevons ce type de retour, notre objectif est de comprendre quels facteurs ont pu influencer l’expérience de l’apiculteur sur le traitement. Nous examinons alors différents aspects liés à l’usage du produit : stockage, manipulation, application et toute autre circonstance pertinente afin de reconstituer la situation et d’identifier les facteurs contributifs possibles.
L’apiculteur de ce cas a partagé volontiers toutes les informations nécessaires. Il avait pris des photos des lots des traitements achetés en ligne : un pack de 12 lanières, non expiré (selon la date de fabrication visible sur l’emballage). L’emballage était intact à la réception, et tout doute concernant le produit lui-même ou ses conditions de transport et de stockage a été rapidement écarté.
Nous avons donc posé à l’apiculteur des questions plus précises pour éclaircir ce qu’il s’était passé.
Le premier élément frappant fut la contradiction entre la forte chute perçue de varroas pendant le traitement et la réinfestation rapide seulement un mois après. Nous avons demandé quand avait eu lieu son dernier traitement contre varroa avant l’application du traitement à base d’amitraz mi-août. La réponse a largement dissipé les inquiétudes quant à une hausse trop rapide de la population de varroas avant l’application du traitement : « Je les ai traitées deux fois cette année… à l’acide formique. En mars et en juin », nous a-t-il dit. Il nous a aussi indiqué avoir surveillé ses colonies au printemps et après le second traitement à l’acide formique en juin. Sur ses 10 colonies, il en avait contrôlé 5. Voici les résultats des lavages à l’alcool de la dernière semaine de juin, après traitement :

Ces résultats ont montré que le taux d’infestation (par 100 abeilles) était très faible pour cette période de l’année, indiquant un traitement préalable réussi. Entre 0 et 1 % fin juin / début juillet se situe en dessous des seuils d’intervention.
L’équipe Véto-pharma a conclu :
« Si le taux d’infestation n’était pas hors de contrôle avant le traitement à base d’amitraz, il reste peu d’explications alternatives pour justifier une charge aussi élevée seulement un mois après la fin du traitement. »
Première piste : la réinfestation. Nous avons alors cherché à savoir si :
Les options a) et b) ont été exclues immédiatement : les colonies n’avaient pas bougé depuis mai, et aucune nouvelle colonie n’avait été ajoutée.
Pour l’option c), l’apiculteur était certain qu’aucun autre rucher ne se trouvait dans un rayon de 10–11 km. Il l’a confirmé après avoir contacté le voisinage.. pendant ce temps il retraitait ses colonies, cette fois par sublimation d’acide oxalique.
Deuxième piste : l’application elle-même. Nous avons demandé : quelle posologie avait été appliquée, le type de ruche, la configuration du corps de ruche, et toute autre manipulation effectuée durant les 8 semaines de traitement.
L’apiculteur nous a répondu : « J’ai appliqué deux lanières par corps de ruche (ou une lanière par cinq cadres d’abeilles), comme indiqué dans la notice.» (notice applicable aux États-Unis)
Il nous a aussi envoyé des photos de ruches ouvertes avec les lanières en place.
Ces photos furent une mine d’or.
Nous avons appris qu’il utilisait des Langstroth simple corps, qu’il avait bien mis deux lanières dans chaque corps… mais qu’un second élément était présent au-dessus : une hausse. Or aucune photo ne montrait des lanières dans cette hausse.
En examinant de plus près les photos, nous avons conclu que les hausses supérieures devaient être des hausses à miel. L’apiculteur a confirmé ce soupçon et nous a expliqué : “Je n’essayais pas de récolter le miel de ces hausses. Le miel présent dans ces cadres est une source de nourriture pour les abeilles !” Il a ensuite mentionné qu’il avait observé que ses colonies étaient très fortes au début du mois d’août et qu’il avait décidé de laisser ses abeilles consommer leurs propres réserves de miel avant de leur fournir un apport supplémentaire en glucides plus tard dans l’année. Il souhaitait également leur offrir davantage d’espace avant que les colonies ne commencent à réduire leur population d’abeilles d’été à l’automne. Ainsi, il a choisi d’ajouter des hausses au-dessus des corps de ruches et de nourrir les abeilles avec du sirop de sucre. Il a laissé tout le nectar et le miel présents dans ces hausses comme nourriture pour ses colonies.
L’étiquette du traitement à base d’amitraz indique que les hausses ne doivent pas être présentes sur les ruches pendant un traitement à base d’amitraz. D’un autre côté, ajouter des hausses durant le traitement uniquement comme source de nourriture pour les abeilles constitue une zone grise. De toute évidence, le miel stocké dans ces hausses n’était pas destiné à la consommation humaine. Les questions les plus fréquentes dans ce type de situation concernent généralement le matériel et son utilisation future. Nous recommandons que les hausses ayant été présentes sur les ruches durant le traitement – pour nourrir les abeilles – soient soigneusement nettoyées avant d’être utilisées pour une production de miel destinée à la consommation humaine. Tout le miel collecté pendant un traitement à base d’amitraz doit être retiré avant que les mêmes cadres ne servent à nouveau à la récolte l’année suivante. Idéalement, la cire de ces cadres devrait être renouvelée.
Cependant, revenons à notre principale préoccupation concernant le taux d’infestation de varroa des colonies : l’ajout de hausses a-t-il contribué à l’augmentation rapide du niveau d’infestation après le traitement à base d’amitraz ? Notre première question à l’apiculteur fut : “Avez-vous installé une grille à reine entre le corps de ruche et les hausses” Et c’est là que nous avons eu notre moment “Eureka!”: l’apiculteur n’avait effectivement pas ajouté de grille à reine au-dessus du corps de ruche, ce qui a potentiellement offert un refuge commode aux varroas – sans aucune lanière du traitement à base d’amitraz présente dans les hausses.
Lorsque nous avons commencé à exprimer nos inquiétudes concernant une diminution de l’efficacité du traitement due à la présence possible de zones de couvain dans les hausses, l’apiculteur s’est montré quelque peu penaud et a promis d’examiner de plus près les hausses situées au-dessus de ses corps de ruche. Un jour plus tard, il nous a confirmé — photos à l’appui — que des plaques de couvain de tailles variables étaient présentes dans toutes les hausses.
Nous avons tenté d’encourager l’apiculteur à faire davantage confiance au cycle saisonnier naturel de ses colonies à l’avenir. Un certain nombre d’apiculteurs débutants ou récents s’inquiètent lorsque la fin de l’été approche et qu’ils perçoivent leurs colonies comme “trop populeuses”. Ce phénomène est peut-être lié aux avertissements répétés que reçoivent les nouveaux apiculteurs concernant la prévention de l’essaimage au printemps. Mais l’accent mis sur “ajouter plus d’espace dans la ruche”, surveiller les cellules royales ou diviser les colonies pour éviter l’essaimage au printemps n’a aucune implication pertinente sur l’état des colonies en août.
À la fin de l’été, les abeilles perçoivent déjà la diminution quotidienne des heures de lumière, et la reine commence à pondre les premiers œufs qui deviendront les abeilles d’hiver. Ajouter davantage d’espace à cette période de l’année devient rapidement une prise de risque plutôt qu’un avantage pour la colonie : la population d’abeilles d’été est destinée à décliner, et plus d’espace rendra plus difficile le maintien de la chaleur dans les mois suivants — tout en nécessitant plus de travail de gestion pour l’apiculteur.
Nous espérons que ce cas a permis de mieux comprendre l’impact des actions de gestion menées tout au long de la saison et la façon dont elles peuvent influencer l’efficacité d’un traitement contre le varroa. Même lorsque les apiculteurs lisent attentivement les notices, respectent la posologie et la durée du traitement, il existe encore des pièges dans la gestion de la ruche qui peuvent influencer directement le succès du traitement. Dans ce cas précis, la présence de zones de couvain “cachées” et d’un espace permettant aux abeilles (et aux varroas !) d’éviter le contact direct avec des lanières dans le corps de ruche a forcément eu un effet négatif sur l’efficacité du traitement. S’il est judicieux de ne pas placer de lanières dans les hausses — afin d’éviter toute contamination, dans le cas d’une consommation humaine — l’apiculteur, ici, a offert aux varroas un abri confortable : hors de vue, hors d’atteinte.
par Véto-pharma
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